Poème #23 – Affaire Traitée
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Poème #23 – Affaire Traitée

Attention ! Le texte que vous vous apprêtez à lire contient des formules plutôt crues et évoque des situations qui pourraient heurter les personnes les plus sensibles.

27 Janvier 2015

[Affaire traitée]

Vous m’avez pris,

Forcé à écouter,

Soumis,

Craché dessus et violé.

Combien de fois,

Sans un mot, j’ai regardé ?

Je n’ai pas su dire que j’étais moi,

M’affirmer, ni même pleurer.

Face à vous tous,

Je n’avais aucune chance,

Car vous la feigniez douce,

Cette macabre danse.

Vous m’avez ri au nez,

Sans même que je ne le vois.

Vous avez bien rigolé,

Vous vous êtes foutus de moi.

Quand j’avais mal,

Je croyais pouvoir me reposer.

Alors que tout était grouillant, animal,

Dans mon dos… en vérité.

Vous m’avez pris,

Broyé, déchiré,

Soumis,

Scarifié et violé.

Combien de fois ?

Combien de fois me suis-je laissé faire ?

J’ai subi, et j’ai su me taire.

Combien de fois ?

Grâce à vous, j’ai failli,

Côtoyer le cimetière…

Aujourd’hui je fuis,

Je suis brisé, amer.

J’ai peur la nuit,

Je voudrais voir mes cauchemars se taire.

Vous m’avez traîné en enfer,

Et vous avez pourri

Tout ce que je gardais de moi.

Vous avez trouvé ce qu’il me restait de foi,

Craché dessus comme vous aviez fait sur moi.

Vous m’avez induit la paranoïa,

L’incertitude, le manque de confiance en soi.

Vous m’avez écrasé, combien de fois ?

Vous m’avez roué de coups, sans cesse,

M’avez tenu comme un chien en laisse.

Prétextant de bons sentiments,

Pour faire de moi votre jouet.

À l’image de Satan

Vous avez piétiné

Ma religion,

Mes croyances, mes convictions.

M’avez, à vie,

Rendu malade de moi-même,

Par cette vision, asservi,

Poussé à me regarder avec haine.

Grâce à vous, aujourd’hui,

Je tremble et je vomis.

J’ai peur de me lever,

De croiser mon ombre ou, pire, la réalité.

Ce que vous m’avez fait,

Ne tient pas en quelques lignes.

On ne résume pas l’indigne.

Mais…

Je vous aurais souri.

Par égoïsme, pour me convaincre que je vis.

Pour vous montrer que sans vous,

J’existe aussi.

Et parce que malgré tout,

Cela ne résumera pas ma vie.

Oui, juste parce que la vie continue,

Je vous aurais montré mon cul.

Alors que je n’arrive pas à y mettre les mots,

Je vous aurais reconsidéré de zéro.

Seulement, j’aurais dû voir au-delà,

J’aurais plutôt dû comprendre,

Que quand on se conduit comme cela,

Il n’y a plus rien de bon à prendre.

Que quand on ne sait pas vivre autrement,

Qu’en voyant des personnes souffrir,

Tout ce qu’on dit se ment,

Et même bien pire…

J’ai réalisé bien trop tard,

À quel point vous étiez des connards.

Des manipulateurs sans scrupules,

Que seul la calomnie stimule.

Des enfoirés dévoués,

Qui n’auraient jamais dû exister.

Parce que le pire dans cette histoire,

Personne ne pourra le nier,

C’est que vous m’avez regardé

Avec ces grands yeux noirs,

Du genre faussement couverts de larmes

– une autre de vos armes –

Vous m’avez éloigné de mes amis,

Pour mieux pouvoir plaider ce qui suit…

Vous vous êtes levés,

M’avez désigné, résignés,

Car je ne me soumettais plus.

Et vous ne vouliez pas avoir perdu.

Pour tout ce que vous m’avez fait,

Et pour cent fois m’avoir violé ;

Vous m’avez dit ce qui aujourd’hui m’accable…

Vous avez eu ce propos déplacé ;

Vous m’avez déclaré « Coupable ».

Affaire traitée…

Il me semble que c’était il y a quelques jours, sur Au Secours, que je parlais de certains poèmes avec une histoire et un contexte un peu plus vaste que la simple émotion initiale comme pulsion créatrice. Ce poème fait partie de ces textes privilégiés au cadre plus large que la moyenne. Son histoire n’est pas particulièrement longue, cependant elle prouve que les vers ne poussent pas toujours de la même façon. 

Cet écrit, à l’origine, il ne s’agissait que d’une logorrhée en prose, un défouloir craché à l’improviste pour pousser une gueulante envers quelques personnes. Je ne les ai d’ailleurs jamais clairement prises à parti, et elles ne sauront jamais que ce texte leur est adressé. Déjà à l’époque où je vomissais cette haine j’étais assez lucide pour voir qu’ils ne comprendraient pas ni ne se remettraient en question. Alors je l’ai juste posé là, aux yeux de tous, pour que chacun puisse jaser et commérer sur les terribles personnes qui ont pu me mettre dans cet état, sans savoir qu’ils en sont les premiers responsables. 

“Dans ce cas, comment se fait-il que ce soit un poème ?” me direz-vous. 

La question est pertinente. Non seulement tout était rédigé en prose à l’origine, mais en plus, le manuscrit n’avait aucunement vocation à devenir une poésie. 

Seulement, quelques semaines ou mois après avoir déferlé ce texte, je me suis rendu compte qu’il contenait beaucoup de rimes internes. Celles-ci avaient été faites par inattention mais donnaient un certain rythme au poème. Bien que ce rythme soit assez décousu, il accentuait la sensation de malaise que voulait représenter le texte. Je me suis donc mis à le découper en vers, puis à corriger certaines rimes bancales, pour en arriver à peu de choses près à la version que vous venez de lire. 

Cette origine explique en grande partie la structure très irrégulière de cette ballade maladive, mais comme dit juste au-dessus, je trouve que cette forme renforce tout ce qui est véhiculé par les phrases. De plus, Affaire traitée n’a vraiment pas vocation à être musical ou agréable à l’oreille. Il s’agit simplement d’un coup de gueule, et éventuellement de dire à ceux qui ressentiraient des choses semblables qu’ils ne sont pas seuls et beaucoup traversent ce genre d’épreuves.  

C’est aussi à cela que servent les mots. 

Sur ce,

Belle Lune,

Wayce Upen Foya

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