2016
[Injustice]
Quand on n’a plus le courage de se battre.
Quand on a l’impression de s’être fait abattre ;
Le sentiment de s’être pris une balle en pleine tête ;
De s’être fait assassiner sans procès.
Quand tout a un goût de défaite.
Quand on a pour seule envie celle de renoncer.
Quand on veut hurler à la mort,
Laisser échapper la colère du trémor.
Quand on voudrait juger les bourreaux qui nous condamnent
Brûler ces idéologies pour lesquelles ils se dament.
Quand on voudrait que la nature choisisse
Au lieu de ces hommes qui manipulent les droits
Pour nous forcer à faire leurs choix.
C’est cela que j’appelle « Injustice ».
Petite période d’inactivité sur le site qui s’achève ici et maintenant avec la publication d’un gros morceau. J’espère avoir suffisamment fait monter le suspens pour que cet article soit dévoré à sa juste valeur même si, malheureusement, nous n’allons pas aborder de choses joyeuses aujourd’hui. Il s’agit d’un part importante de ma persona, et il faudra de toute manière l’aborder si vous comptez vous perdre sur le site, donc autant tout faire dans la foulée. Parlons donc de ce poème !
Injustice est une production pour le moins intéressante. D’abord, elle est un peu plus mature que beaucoup de choses que vous avez pu lire jusqu’ici. Je ne dis pas ça simplement en fonction de sa date d’écriture, car il y a des poèmes qui, même récemment, manquent de développement. Ici, la strophe est courte, construite, efficace… et elle dit tout ce qu’elle a à dire.
Cette “oeuvre” offre déjà beaucoup individuellement. Pourtant, je ne peux pas résister à cette envie de la contextualiser. Je dirais même que c’est un besoin, plus qu’une envie.
« Pourquoi est-ce si important ? »
Parce que les circonstances de sa naissance touchent directement la personne que je suis aujourd’hui. Certes, au moins une bonne moitié de mes textes poétiques est relative à des choses que je vécues, mais ce sont des événements qui appartiennent généralement au passé. Même si ces choses ont participé à me construire, elles ne s’inscrivent pas dans le tronc des “états” – je ne sais pas comment définir ça – que j’utilise aujourd’hui pour me définir. Tandis que ce poème-ci répond directement à une attaque personnelle que j’ai vécue et que je vis encore aujourd’hui comme une agression. On pourrait presque parler d’écrit immunitaire. En réalité, c’est presque une demande d’approbation adressée aux autres êtres humains, comme pour entendre de la part de quelqu’un d’extérieur que je suis effectivement en droit de me sentir attaqué.
Alors, après avoir autant fait monter la pression en parlant de cet événement que je considère comme traumatisant, je ne vais pas vous laisser sur votre faim.
Néanmoins, plutôt que de tout expliquer de façon un peu plus reculée comme je le fais dans ces Post-Scriptum, je vais vous laisser appréhender un autre texte. Il s’agit d’un article de mon ancien RantBook initié sur Wattpad un jour de folie passagère (savoir si je referai un RB sur ce site est un autre combat, mais je republierai certainement la plupart de ces textes quand le besoin se manifestera, comme ici).
Les dates ne correspondent pas exactement, mais les deux écrits découlent d’une même période et parlent de la même chose. La différence majeure étant que le poème est né en plein milieu des troubles et que l’article de RantBook fut rédigé pendant une phase de transition juste après la fin des événements oppressants. La rancœur était toujours présente mais le propos un peu plus maturé que si j’avais écrit tout cela dans le feu de l’action.
“L’instant Post-Scriptum » fait directement partie de l’article, puisque c’est une mécanique que j’ai prise à ce moment-là.
J'ai l'impression d'être morte
~ Insomnies du 3 au 4 Septembre 2018 ~
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J’ai l’impression d’être morte.
Pourquoi au féminin ? Parce que justement, ce petit bout de femme qui grandissait en moi et qui commençait à peine à s’assumer, que je poussais lentement mais sûrement vers sa sortie au grand jour, est en train de suffoquer, asphyxié.
Mes cheveux longs, c’était cette part de moi que j’avais tant de mal à revendiquer dans notre monde où tout est soit bleu, soit rose. Aujourd’hui, j’ai l’impression de les perdre un peu plus chaque jour ces cheveux. Quand je les coiffe j’ai la sensation qu’il sont trop nombreux à tomber. Ils ont souffert. Ils sont écaillés, meurtris. Avant, je ne les attachais jamais. Mais pour les faire survivre, je n’ai pas eu le choix.
Au début, j’ai contesté. Je ne voulais pas qu’on me les coupe. Je ne voulais pas perdre toute cette assurance que j’avais si durement gagnée. Je ne voulais pas perdre cette partie de moi. Mais les contestations étaient vaines.
J’aurais, je crois, préféré qu’on m’empoigne violemment et qu’on me rase la tête de force. Parce que dans cette bataille-là, je n’avais non seulement pas le choix, mais en plus c’était à moi de prendre l’initiative. C’était à moi de les faire couper.
Alors je les ai faits couper. Une fois, puis deux, puis trois, jusqu’à ce que cela en devienne insupportable. Jusqu’à ce que les larmes ne suffisent plus pour évacuer cette peine. Quand je n’ai plus pu en supporter davantage, j’ai décidé que je ne les couperai plus. Mais personne ne devait savoir qu’ils repoussaient comme ils avaient étés jadis. Il n’y avait qu’une seule solution.
Je les ai attachés. Du lendemain de la dernière taille jusqu’à mon évasion, je les ai attachés. Au début, c’était ridicule. Ils étaient à peine assez longs pour les passer dans un élastique. Mais au fur et à mesure, j’ai eu de moins en moins de mal à les faire tenir. Il a commencé à y avoir un chignon. Puis le chignon a pris du volume.
J’avais peur. J’étais effrayé à l’idée qu’on m’attrape en train de frauder ainsi. S’ils avaient su…
Mais j’étais en sécurité. J’avais la réplique. Il suffirait de dire « je vais bientôt les couper » et tout se passerait bien. Sauf, bien entendu, le fait que je devrais effectivement me les faire recouper. Mais cela éviterait au moins le conflit. Ils ne pouvaient pas accuser ma mauvaise foi si l’histoire se terminait toujours avec moi obéissant.
Ce que j’ai fini par comprendre, c’est que l’important n’était pas que mes cheveux soient courts. Mais que je leur obéisse aveuglément. Ou au moins que je feigne ce comportement comme je l’ai fait. Si tu ne fais pas de vague, si tu ne remets pas en cause leur autorité, tu auras le droit de vivre.
Mes cheveux n’ont jamais aimé être attachés. Tout comme moi je n’ai jamais aimé être enfermé. Mais les uns comme l’autre nous avons survécu.
Pourtant, j’ai l’impression que je suis morte.
◄►
Je sais très bien que ces cheveux sont une jolie métaphore. On m’a pris tellement plus que ma féminité.
Pendant cette période, j’ai eu l’occasion de perdre de vue bon nombre de mes connaissances ; de perdre une trop grande tranche de ma volonté ; de perdre mon sourire de tous les jours ; de perdre mon élan passionné et irréfléchi ; de perdre presque toute ma dignité.
Et j’ai beau avoir vécu de belles choses là-bas, avec ceux qui, comme moi, voulaient réformer le système, il y a des moments où je n’arrive plus à les voir. Il y a des moments où je suis épuisée, et où j’enrage vainement de tout ce que j’ai perdu.
Évidemment, j’ai toujours été fragile. Et je ne peux pas leur mettre sur le dos tout ce qui m’est arrivé. Surtout lorsque j’étais seul.
Mais est-ce que me pousser dans le vide était la chose à faire ?
J’aurais aimé que quelqu’un se pose la question.
◄►
La plupart du temps, maintenant, il y aura de belles choses qui tisseront une nappe pour recouvrir ces cauchemars. Non, je n’y penserai pas tout le temps. Mais dix minutes de mélancolie effacent avec tant de facilité des heures de bien portance.
Petit à petit, je vais retrouver mes morceaux. Mes cheveux vont repousser, vont guérir. Petit à petit, j’espère, je vais retrouver confiance en moi. Mais combien de temps faudra-t-il pour récupérer ces acquis qu’ils ont si facilement balayés ? Combien de temps encore il me faudra pour arriver à enlever cette crasse invisible qui colle si fort qu’on la croirait incrustée sous ma peau ?
Ils m’ont demandé de me couper les cheveux. Pour eux c’était une banalité. Mais cela m’a brûlé les ailes.
J’aimerais juste savoir…
À chaque fois que l’on applique bêtement les règles,
Combien de personnes ne s’en relèvent pas ?
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L’instant Post-Scriptum
En toute honnêteté, j’ai beaucoup hésité à sortir cet article. Il n’est pas très joyeux et chronologiquement, il arrive en deuxième. Alors après le mal que je m’étais donné pour faire une si belle introduction (elle est bien mon intro, hein ?), j’avais peur de ruiner cette bonne ambiance. Mais, au final, on s’en fout de faire fuir tout le monde, hein ?
Plus sérieusement, je me suis dit que ces pages sont faites pour que j’y mette un peu de tout. Pour parler de ce qui m’arrive, aussi. Alors pourquoi ne pas partager mes insomnies ?
Autre chose, quand j’associe »cheveux longs » et »féminité », cela ne veut pas dire que je considère que les femmes aux cheveux cours ou rasés ne sont pas féminines. C’est surtout parce que moi, tel que je suis, c’est un des seuls moyens que j’ai pour m’affirmer dans cette voie. Cela a été un peu ma bouée de sauvetage. Mais il faut comprendre que mes cheveux représentent ma féminité. Et cette vision n’est appliquée qu’à moi dans cet article.
Sur ce,
Belle Lune,
Wayce Upen Foya