[Perdu]
Il n’avait rien à dire,
Il pouvait juste écrire,
Il laisserait rimer,
Sans jamais s’arrêter,
Chacune de ses pensées.
Tout aurait pu s’effondrer,
Tout aurait pu s’arrêter,
Mais tout avait continué,
Le laissant sur le bas-côté.
Il aurait voulu crier,
Montrer qu’il était déchiré,
Mais il ne pouvait hurler,
Ne sachant même plus pleurer.
Ne lui restait plus qu’à avancer,
Ne cherchant plus à penser,
Ne lui restait plus qu’à avancer,
Suivre le pas jusqu’à se réveiller.
« Une écharde »
C’est ce qui m’est venu en tête lorsque j’ai commencé à penser à ce que j’allais dire à propos de ce texte. Depuis que j’ai commencé à publier les textes de cette partie Un Matin de Janvier je fais des simagrées autour de mon niveaux d’écriture à l’époque, mais c’est peut-être fermer les yeux sur un autre aspect peut-être plus important.
Certes, ce sont des poèmes maladroits, mais qui pourrait blâmer un gamin de quinze ans qui fait ses premiers pas dans le monde de l’écriture ? Même si la rime en « é » est probablement la plus courante de la langue française, ce texte ne se résume pas qu’à ça.
Je pense que la raison pour laquelle je renie autant ces poèmes, c’est qu’ils me replongent en partie dans l’époque où je les ai écrits. Je veux dire, il y a d’autres textes dans ce Recueil que je me vois déjà dénigrer avant l’heure, mais pourquoi ce sont ceux-là qui me déplaisent le plus ?
Peut-être est-ce parce que les relire m’ancre dans un moment de mon existence que je ne souhaite plus jamais revivre. Je ne peux pas anticiper la façon dont vous, en tant que lecteur, vous appréhendez ces poèmes. En revanche, quand je les lis, je sais exactement ce que j’ai pu ressentir, ce qui m’a fait suffisamment de mal pour en arriver là. Je ne suis pas en train de dire que ce que je vois à travers ces lignes est ce que vous devriez voir, parce que chacun a sa propre sensibilité ; mais de mon côté, c’est comme si je m’emprisonnais dans ce moment, comme si je n’avais pas le choix de penser ou vivre autre chose.
Ce qui me rend malade, c’est que je sais pertinemment qu’il n’y a pas la moindre once d’espoir dans ce texte. Comme si on avait pris l’âme de ce gosse pour en essorer toute la naïveté en un instant et qu’il ne reste plus que des idées noires et une détresse constante.
Quand je relis ce Matin de Janvier, je n’ai pas le choix de ce que je ressens. C’est comme une écharde coincée sous mon ongle, que je n’arrive pas à extirper. À chaque lecture c’est un peu comme appuyer sur cette écharde. Je ne peux même pas choisir de ne rien ressentir, puisque c’est déjà une part de la sensation en question.
Sur sept poèmes il n’y a que 8 vers tournés vers l’avenir – parce que je reste une éternelle optimiste malgré tout ce que je peux râler – mais dire que je les pensais entièrement lorsque je les ai écrits ne serait pas vrai. Il fallait une corde à laquelle se raccrocher, j’ai dû la tisser dans le vide. Si je m’étais concentrée uniquement sur la douleur que je ressentais, je ne serais probablement plus là pour en parler aujourd’hui.
Les poèmes « noirs » que j’ai écrits plus récemment sont certes beaucoup plus violents que ceux-là, mais ils découlent surtout de pulsions ; de la colère, de la rage, du désir… ce n’est pas un détail. Parce que, quand je les relis, cette même pulsion me revient en tête. Une pulsion, c’est de l’énergie, c’est une secousse, un besoin d’agir.
Dans les poèmes du Matin de Janvier, il n’existe aucune pulsion. Juste un trou béant, une toile noire, lisse, dépourvue d’absolument toute envie. Ces poèmes ne cristallisent en moi qu’un seul concept : la mort.
J’espère ne pas avoir trop entamé votre moral. Ces lectures ne sont peut-être pas des plus agréables mais partager ce qui entoure la création des textes est aussi un des intérêts de rédiger des articles de blog. Si vous voulez vous épargner ce genre de choses, je vous invite à ignorer les Post-Scriptum des textes tristes, parce qu’ils ont souvent des genèses concordantes.
Bien entendu, je m’appliquerai à mettre autant d’emphase sur les poèmes joyeux lorsque j’aurai beaucoup à en dire ! (éternelle optimiste, je vous disais)
Sur ce,
Belle Lune,
Wayce Upen Foya